En ces temps d'incertitudes républicaines, l'association Esprit Laïque tenait à prendre position afin de rappeler quelques évidences mises à mal par l'actualité.
L'histoire française n'est pas l'histoire américaine. Le passé esclavagiste de la nation américaine ne peut pas être mis en parallèle avec le passé colonialiste de la France. Ce sont des passés croisés qui n'ont pas conduit aux mêmes débouchés historiques, aux mêmes évolutions de société, de pensée et d’actions politiques, d’hier comme d'aujourd'hui.
Les sociétés françaises et américaines n'ont strictement rien à voir dans leurs constructions. La société américaine est dirigée en premier lieu par une pensée religieuse, libérale, individualiste et séparative, qui reconnaît à tous une appartenance communautaire ou religieuse, gérée en sous-groupes cultuels et/ou culturels. Ce qui potentiellement conduit ces groupes à des logiques territorialistes et d'exclusion. Le suprémacisme est une idéologie qui hiérarchise les individus selon des postulats raciaux.
La France, quant à elle, reconnaît une seule identité, celle de citoyen dans la cité. Elle refuse, par sa constitution, la division par le communautarisme et conçoit la nation comme unie autour des ses institutions. L'État ne reconnaît pas les cultes et ne s'arroge aucune pensée philosophique religieuse. La loi de 1905, elle, acte une séparation et contraint les cultes à se tenir éloignés du pouvoir temporel, permettant ainsi de maintenir le fonctionnement régalien hors de portée des pressions religieuses.
Le racisme, c'est le racisme ! Il n'y a pas de variables entre les racistes, ni entre les racismes. Est raciste celui qui définit l'autre par la race, ou qui se définit par la race. Que ce soit en matière religieuse, en matière sociale, ou matière racialo-raciste. Par conséquent, les essentialismes musulmans ou catholiques, le racialisme, l'antisémitisme, les suprémacismes de tous ordres sont des racismes, et doivent être traités comme tels. Le racisme n'est pas une valeur républicaine. La République permet à chacun de faire connaître sa culture, sa religion ou son origine, tant qu'elles ne s'élèvent pas contre l'unité et l’égalité républicaines.
La police ou la gendarmerie ne sont pas des institutions racistes. Elles sont à l'image de la société, reflets des qualités et des composantes de la diversité de la nation française.
Il est donc légitime de penser que dans ces deux corps de sécurité de l'État puissent évoluer des personnes fondamentalement racistes, suprémacistes et même racialistes, sans d'ailleurs que cela ne soit attaché à une couleur de peau, à des convictions politiques et/ou religieuses. Rappelons-nous à titre d’exemple l'attentat de la préfecture de Paris et Mickaël Harpon, fonctionnaire de couleur et de confession musulmane. La police républicaine est entièrement subordonnée à des décisions hiérarchiques, et à l'image renvoyée par les préfets et le ministre de l'Intérieur. Sous cette mandature, le contrôle des populations par les forces de sécurité et les doctrines d'encadrement des manifestations sociales ont jeté un discrédit sur l'image de la police. Ce déficit d'image facilite le travail de sape des idéologies antirépublicaines, qui trouvent par ailleurs des relais dans les représentant politique de ce pays.
À ce jour, il est impossible de prendre position sur l'affaire Adama Traoré, qui est devenue une affaire médiatique plutôt que judiciaire. Le volet judiciaire est au point mort, en raison des « expertises » produites par la famille (qui n’en sont pas, mais de simples avis médicaux rémunérés, sans accès au dossier médical, sur du déclaratif) en réaction aux expertises judiciaires légales. En l'absence de jugement, il est donc impossible d'affirmer que la mort d’Adama Traoré est liée aux pratiques policières (gendarmerie en l'espèce) lors de son interpellation. De plus le caractère raciste de ce décès ne peut être mis en évidence, puisque rien ne permet d’affirmer que les gendarmes l'aient interpellé uniquement sur la base de sa couleur de peau ou de ses origines.