Asia Bibi, ou la normalisation du blasphème mondialisé.

Par Le 12/11/2018

Cette histoire illustre à merveille la théorie de l’aile de papillon battant à Tokyo pour déclencher un tremblement de terre à Pointe à Pitre.

Au tout début de l’affaire, la jalousie d’une femme blessée. Asia Bibi est la deuxième femme d’un homme qui a divorcé de sa première femme pour l’épouser.
La première femme n’a jamais pardonné et pour se venger, avec l’aide d’amies musulmanes, elle a fait accuser la chrétienne Asia Bibi d’avoir puisé de l’eau dans un puit musulman.
En plein d’endroits du globe un tel motif aurait été débouté, d’ailleurs personne n’y aurait pensé, mais au Pakistan cela mena Asia Bibi droit dans le couloir de la mort, où elle est restée 8 ans dans l’attente de son jugement.

Le motif? Asia Bibi est chrétienne et comme le puit appartient à un musulman, et que la dénonciatrice, pour assurer sa cause, a accusé Asia Bibi d’avoir prononcé des paroles contre le prophète, Asia Bibi est donc accusée de blasphème.


Comment concevoir qu’une telle histoire, mondialement connue, n’ait pour origine qu’une triviale histoire de jalousie féminine?
C’est que pour les occidentaux que nous sommes, nourris à la laïcité, il peut être compliqué d’appréhender la totalité du processus religieux enclenché dans cette affaire. En revanche, l’ex-femme du mari d’Asia ne pouvait ignorer qu’en agissant ainsi elle mettait en danger la vie d’Assia Bibi et de sa famille. Comme dans les affaires de Salman Rushdie, Taslima Nasreen ou les dessinateurs de Charlie Hebdo, l’accusation de blasphème vaut en effet condamnation à mort.

Le sort d’Asia Bibi aurait pu se régler en toute intimité, tant il semblait scellé, mais c’était sans compter sur la journaliste Anne Elisabeth Tollet alors en poste au Pakistan. Elle s’empara de l’affaire et pendant 9 ans remua ciel et terre pour sauver Asia Bibi, en créant un comité de soutien, en écrivant un livre avec la prisonnière et en ralliant autant de soutiens qu’elle put aussi bien au Pakistan qu’en France.

Enfin après bien des atermoiements le procès a eu lieu, et oh miracle! Asia Bibi a été acquittée.
Immédiatement, des extrémistes islamistes manifestèrent en masse dans tout le pays, exigeant son exécution. Sous leur pression, le gouvernement sembla céder et autorisa un nouveau jugement en appel. Mais la Cour suprême du Pakistan annula la condamnation, ce qui permit à Assia Bibi de sortir de prison, de se réfugier dans un lieu sûr en attendant d’être extradée vers une destination inconnue.

Asia et sa famille ont demandé à être accueillis en Grande Bretagne, aux États Unis ou au Canada. Mais la Grande-Bretagne a refusé d’accorder l'asile par peur de provoquer des "troubles" au Royaume-Uni et des attaques contre des ambassades. Un groupe de campagne britannique en contact avec la famille a déclaré que le gouvernement britannique travaillait pour aider Asia Bibi, mais qu’il ne pouvait offrir l'asile. Cela choque nombre de Britanniques, notamment chrétiens, qui ne comprennent pas comment la Grande Bretagne, terre traditionnelle d’accueil, peut refuser l’asile à une femme sous prétexte qu’elle est chrétienne et que des extrémistes pakistanais de Grande Bretagne s’y opposent. En somme, les islamistes du Pakistan ont trouvé un soutien chez leurs pairs en Grande Bretagne et ils imposent leurs desiderata à un pays souverain!

Dans un moment comme celui-ci, face à une telle situation, nous mesurons à quel point un pays comme la France, républicain et non communautariste, laïque et non multiculturel, peut opposer la loi de la cohésion laïque et républicaine aux lois religieuses les plus destructrices et les plus aberrantes.

Si demain, Emmanuel Macron (re)donnait (sic)à l’islam sa «place particulière», grâce à une refonte de la loi 1905, il deviendrait beaucoup plus difficile d’empêcher les tenants d’un islam rigoriste et extrémiste de peser de tout leur poids contre l’accueil d’une prochaine Asia Bibi, à l’instar de ce qui se passe en Grande Bretagne.

 

M.P & F.M

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